Maurice Schumann,
la voix de la Résistance
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La présence de Maurice Schumann dans
cette journée d'études s'avère légitime à double titre. D'une part,
Maurice Schumann était sans nul doute devenu pleinement un homme du
Nord, s'identifiant à un demi siècle de notre histoire nationale mais
également régionale. D'autre part, par le titre de la problématique
retenue : " L'engagement dans la résistance dans l'Europe du Nord
Ouest ". Maurice Schumann a participé au premier plan à la résistance
contre l'ennemi allemand. Il a été, au cours des cinq années de guerre,
la voix de la résistance de la France libre qui, chaque jour, s'adressait
aux Français et aux combattants de l'ombre pour les encourager à poursuivre
leur périlleux et courageux engagement. Ce texte a donc pour but de
présenter les grandes lignes de son engagement et montrer en quoi
sa fonction de porte-parole de la France Libre le situe parfaitement
dans les perspectives qui sont celles du musée de Bondues. Dans un
premier temps, il sera question de la précocité de l'engagement puisque,
si l'on s'en tient à la formule consacrée, Maurice Schumann appartient
au cercle restreint des résistants de la première heure. Dans un second
temps, il sera question de l'aide apportée à la résistance. Enfin,
pour faire en quelque sorte écho au témoignage émouvant de Madame
Thérèse Bonte, il sera question de l'écho de sa voix sur les résistants
et plus largement sur l'opinion publique.
Un résistant de la première heure Maurice Schumann voit le jour à
Paris le 10 avril 1911 dans une famille bourgeoise aisée. Ses premiers
engagements politiques se situent nettement à gauche. Etudiant à Paris,
il adhère à la Ligue d'Action Universitaire Républicaine (LAURS) dont
le Président est alors un certain Pierre Mendés France. Maurice Schumann
franchit le pas et adhère à la SFIO. La section de Paris dans laquelle
il milite le fait rencontrer la seconde épouse de Léon Blum. Celle-ci
lui fera rencontrer le chef du parti socialiste. Le futur ministre
du général de Gaulle ne cachera jamais le charme intellectuel dégagé
par le chef historique du parti socialiste. Sur le plan professionnel,
après des brillantes études qui lui ont notamment valu un prix de
philosophie au Concours général, Maurice Schumann décide, après avoir
dû renoncer à intégrer l'Ecole Normale supérieure pour raison de santé,
de s'orienter vers le journalisme. Il intègre les services de politique
étrangère de l'agence Havas en 1932.
L'année suivante, il part pour Londres. Il y restera trois années.
Ses fonctions professionnelles lui permettront d'acquérir une acuité
particulière concernant la montée du fascisme en Europe. Dès les origines,
il s'y montre résolument hostile. Autant sur le plan politique que,
d¹ailleurs, sur le plan spirituel. Son attirance de plus en plus forte
pour le catholicisme étant, de son point de vue, parfaitement incompatible
avec le paganisme que les nazis tentent d'imposer en Allemagne.
En 1936, Schumann participera activement à Paris à la campagne électorale
de Paul Reynaud, l'un des rares hommes politiques à avoir compris
très tôt ce que représentait pour la France le nouveau danger allemand.
En 1938, Maurice Schumann appartiendra à la petite minorité des antimunichois
alors que lui-même se situe désormais clairement chez les démocrates
chrétiens, animés notamment par le journaliste de l'Aube Georges Bidault.
La déclaration de la guerre un an plus tard ne le prend donc pas au
dépourvu. Lucide, il savait que cette échéance était devenue inévitable,
du fait même de la faiblesse des démocraties à l'égard d'Hitler. A
sa demande, et malgré son état de santé, il est versé dans le service
armé. Il est alors officier de liaison avec l'armée britannique. Le
17 juin, à son grand désespoir, il entend le Maréchal Pétain annoncer
officiellement qu'il faut cesser le combat. Lui ne l'entend pas ainsi.
La suite de son parcours mérite à cet instant de lui donner directement
la parole. Maurice Schumann en compagnie d'autres soldats, se trouve
alors à Niort le 18 juin : " Je vais me laver les mains dans l'arrière
cour d'un café où nous nous étions attardés pour essayer de boire
quelque chose, et j'entends alors la fin de l'appel du général de
Gaulle (moi, général de Gaulle, actuellement à Londres). Je reste
en arrêt et j'entends la dernière phrase : " Quoiqu'il arrive, la
flamme de la résistance française ne doit pas et ne s'éteindra pas
". Je dis à mes camarades qu'il y a à Londres une structure frêle
mais française et nous nous jurons de la rejoindre à tout prix ".
Arrivé à Londres avec une lettre de recommandation de Daniel Rops
et après avoir signé un acte d'engagement dans les Forces Françaises
Libres, le 30 juin, il rencontre enfin de Gaulle. Peut-on parler de
coup de foudre ? Le terme ne semble pourtant pas si déplacé lorsque
l'on a entendu Maurice Schumann raconter cette entrevue. Les relations
qu'a ce dernier à Londres sont précieuses pour de Gaulle qui le charge
de recruter pour la France Libre.
Quelques jours plus tard, il est chargé par le même général de Gaulle
de le représenter quotidiennement pour les cinq minutes auquel il
a droit sur les ondes de la BBC. Sa mission : galvaniser les énergies
résistantes sur le sol national qui sont en train de se former. Il
gardera toujours en mémoire ce que le général de Gaulle lui avait
dit lors de leur première rencontre : " Il faut ramener du bon côté
non pas les Français mais la France ". Sa détermination est entière.
L'ancien journaliste d¹Havas s'était transformé pour les besoins de
la guerre, en un porte-parole d'exilés en quête d¹une souveraineté
à reconquérir. A cette date pourtant, les actes de résistances sont
encore très rares et isolés les uns des autres. La voix du Porte parole
de la France Libre est là pour guider leurs premiers pas. " Etre le
lien avec l'insubmersible " est la définition donnée par Maurice Schumann
lui-même de son rôle. Durant quatre années, jour après jour, Maurice
Schumann va parler sur les ondes par delà la Manche. Symboliquement,
sa première intervention a eu lieu la veille de la fête nationale,
le 13 juillet. C'est en réalité à une véritable guerre des ondes à
laquelle on va assister. Selon une estimation, Maurice Schumann, sur
les 1 417 jours passés à Londres, parla sur les ondes 1 200 fois .
La nature de ces messages a bien évidemment évolué au fil du temps.
Au début, il s'agit avant tout de garder l'espoir.
Il convient effectivement de rappeler que la véritable France, la
France éternelle, ne renonce pas au combat. Aussi, la toute première
de ses allocutions s'adresse-t-elle à François Mauriac qui a écrit
un texte favorable au maréchal Pétain. Le porte parole de la France
libre lui répond par ses mots : " Le drame de la Patrie, nous l'avons
vécu, et nous le vivrons comme le drame de la créature. Et jamais,
François Mauriac, nous ne reviendrons sur nos pas " . En septembre
1945, François Mauriac saluera dans Le Figaro les " Hommes nouveaux
", parmi lesquels Schumann. Il s'agit donc d'une contribution qui
est avant tout intellectuelle. Il est vrai qu'en 1940, la Résistance
n'est pas encore du tout structurée. L'essentiel est d'empêcher la
propagande de Vichy de gagner à elle les esprits. Cette première bataille
est très vite remportée, puisque comme nous le dit Pierre Laborie,
dès 1940, les préfets interdisent l'écoute de la radio de Londres
mais il est déjà trop tard. Le message passe : il faut résister à
l'oppresseur car la guerre n'est pas finie. Elle ne fait en réalité
que se poursuivre du point de vue de Maurice Schumann.
Dans son émission du 3 septembre 1940 intitulée justement " La guerre
continue ", il refuse tout renoncement à la poursuite de la lutte
et constate au contraire que nous n'en sommes en réalité de son point
de vue qu'au " 365 èmes jour de la guerre que l'Allemagne a déchaîné,
et qui ne se terminera que par sa défaite ". Maurice Schumann s'attache
jour après jour à montrer le véritable visage du nazisme aux Français.
En particulier à ceux qui seraient tentés de se laisser conduire dans
la voie de la collaboration. Il faut dire que Maurice Schumann figurait
parmi les rares observateurs à avoir, avant guerre, lu Mein Kampf.
La rhétorique est directe : " Mais prend garde, peuple français, toi
qui, depuis longtemps, a compris où l'on te mène. Ce n'est pas demain,
c¹est aujourd'hui qu¹il te faut imposer ce sursaut " . L'entrevue
de Montoire qui a eu lieu quatre jours plus tôt ne peut donc rien
amener de bon à la France. Il le dit avec force : " Nous tenons (...)
pour sacrilège, toute association directe ou indirecte, de la France
avec son ennemi mortel ". Seule la résistance pourra sauver le pays.
Pour cela, il faut lui venir en aide. L'aide apportée à la Résistance
Très tôt, la radio de Londres va s'intéresser aux actes de résistance
qui ont lieu sur le sol national. Dès le 6 juillet 1940, Etienne Achavanne,
du Havre, est fusillé par les Allemands pour avoir saboté des câbles
téléphoniques. Au début, Maurice Schumann en a connaissance, surtout
pour la zone rattachée, par la presse allemande qui relate l'exécution
de " terroristes ". Rapidement, les canaux d¹information vont se multiplier.
Dès 1941, il peut compter sur ceux qu'il a appelé lui-même " Les hommes
du va et vient ", c'est-à-dire les résistants qui faisaient la navette
entre la France occupée et Londres. Par la suite, lorsque le nombre
de postes émetteurs rendra la chose possible, il recevra des informations
quotidiennes en provenance de la Résistance intérieure. Il pourra
également compter à partir de 1942 de la mise sur pied du Bureau d'information
et de presse (BIP) animée par Georges Bidault.
La collaboration avec Jacques Soustelle, qui devient en 1942 commissaire
à l'Information, est également essentielle. Une véritable amitié naquit
d'ailleurs à cette occasion entre les deux hommes. Le Porte Parole
de la France Libre peut également compter sur la création au sein
du BCRA, d'une section non militaire, chargée de transmettre au Commissariat
à l'Intérieur, dirigé alors par André Diethelm, tous les documents
et télégrammes d'information de caractère politique en provenance
de France, et de transmettre, par le même canal, à la résistance intérieure,
les instructions du Commissariat à l'Intérieur. Maurice Schumann bénéficiait
d'une copie de ces documents, ce qui constituait une mine de renseignements
concernant les activités résistantes. L¹autre grande innovation fut
l'instauration en avril 1942 par Diethelm d'un Comité exécutif de
propagande. On entre alors dans une seconde phase, plus opérationnelle.
Le but de Maurice Schumann est désormais d'oeuvrer à la structuration
de la Résistance. S'il salue comme il se doit les actes de résistance
à l'occupant qui sont, ici et là, de plus en plus nombreux, il en
appelle surtout à l¹organisation de ces mouvements. Dans son émission
du 28 août 1941, il rend hommage au jeune Paul Colette qui a ouvert
le feu sur Marcel Déat et Pierre Laval. Mais aussi héroïque qu'il
soit, ce geste ne saurait suffire : " Nous ne cesserons pas de dire
qu'accepter de frapper ensemble et plus tard, c'est vouloir frapper
plus sûrement et plus fort " explique-t-il. Il faut avant tout songer
à l'organisation. Ce n'est d'ailleurs que sur ce point précis que
l'on peut peut-être déceler une certaine divergence de point de vue
entre Maurice Schumann et le général de Gaulle. Pour ce dernier, quelque
fut le prix à payer, il fallait montrer à l'occupant que la France
n'avait jamais accepté la reddition de juin 40, et qu'elle n'était
en réalité le fait du régime de Vichy et non de la Nation française.
La discussion entre les deux hommes portaient sur l'exécution des
otages de Châteaubriant. A cette date, les relations entre la France
Libre et la France occupée sont encore il est vrai assez aléatoires
dans la mesure où ce n'est qu'à cette date, que le premier émissaire
officiel de la France Libre, Yvon Morandat, sera parachuté en France
occupée. Il va sans dire en effet que dans l¹esprit de Maurice Schumann,
la structuration devait se faire autour de la France Libre et de la
personne du général de Gaulle. Ce qui n'allait pas de soi au début.
Comme l'a écrit Jean Pierre Azema, il existe une réelle " spécificité
originelle de la résistance intérieure " qui n'entend pas se placer
spontanément sous l'autorité du général de Gaulle. L'action de Maurice
Schumann en direction de celle-ci s'inscrit donc aussi sur un plan
politique. Ceci est surtout vrai à partir de 1942. De ce point de
vue, la crise de novembre 1942 entre Darlan et de Gaulle marque un
tournant dans le rôle joué par Maurice Schumann. A deux reprises en
1943, il se rendra en Afrique du Nord pour y favoriser l'implantation
des Comités de la France combattante.
La présentation même du porte parole du général de Gaulle évolue elle
aussi. Au début, la formule est : " Voici le porte-parole de la France
Libre ". A partir de juillet 1942 : " Voici le porte-parole de la
France combattante " . Enfin, à partir de l'été 1943 : " Voici le
porte-parole du Comité Français de la Libération nationale ". L'oeuvre
unificatrice accomplie par Jean Moulin donne un débouché plus pratique
aux messages diffusés par Maurice Schumann à partir de 1943. Désormais,
il s'agit de veiller à la diffusion pratique d'informations destinées
à la Résistance sur le terrain ainsi que de messages à l'adresse des
populations, en particulier au moment des grands rendez vous de la
Mémoire nationale comme le 1er mai ou le 14 juillet. La personnalisation
des messages est de plus en plus manifeste.
La voix de Maurice Schumann est, il est vrai, désormais familière
aux résistants. L¹exemple du maquis des Glières en Haute Savoie est
ici significatif. C'est en janvier 44 qu'y débute l'insurrection contre
les troupes allemandes. La bataille va durer plus de deux mois. Un
véritable dialogue va s'instaurer entre le porte parole de la France
Libre et les résistants. Il reste maintenant à s¹interroger sur l¹impact
de la mission assurée par Maurice Schumann au micro de la France Libre
en direction de la Résistance intérieure. L'Echo de sa voix : L'exemple
des Glières Maurice Schumann n'eut pas comme seul but d'encourager
la résistance morale du peuple de France. Il eut, en même temps, une
action ciblée et concrète envers la résistance intérieure. Il en fut
ainsi en particulier lorsque celle-ci accentua sa pression sur les
troupes allemandes. Certains estimeront à ce propos que Maurice Schumann
joua trop sur l"incitation à appeler les combattants de l'intérieur
à se battre tandis que lui-même, à cette date, se trouvait à Londres.
C'est par exemple l'opinion de Robert Mengin dans son ouvrage De Gaulle
à Londres vu par un Français Libre écrit : " J'estimais monstrueux
que, de Londres, nous puissions inciter nos compatriotes à mettre
leur vie en péril par des actes, du reste, prématurés. Schumann, lui,
porte-parole, signataire enthousiaste de l'acte d'engagement, était
chaque soir, par devoir, le clairon qui, dans le microphone de Londres,
sonnait la charge " .
Cette opinion est toutefois très minoritaire. Pour l'essentiel de
ceux qui l'ont alors connu, en particulier Lucie Aubrac que nous avons
interrogé à ce sujet, il a été, au contraire, par ses allocutions
quotidiennes au micro, une arme de la Résistance durant les années
1943-1944, proclamant tout haut ce que les combattants de l'ombre
pensaient et devaient garder pour eux. Selon elle, " Schumann a été
un véritable soldat car chacun fait la guerre à la place où on le
met ". Quant à Georges Fontenice, qui fut résistant dans le Nord de
la France, note dans son ouvrage Les Français parlent aux Français
que " La BBC donna son plein sens à la résistance larvée dans nos
c¦urs déchirés ". Il conclut son témoignage par ce jugement : " Pendant
quatre ans, l'équipe des Français parlent aux Français et le porte-parole
de la France combattante firent entendre au monde entier que la France
avait toujours son mot à dire " . Pour Pierre Sudreau, autre grand
Résistant, " En 1941, la Résistance n'était encore faite que de groupuscules
sans liens entre eux. Le ferment fondateur de ces multiples initiatives
a été Maurice Schumann qui, de jour en jour, a encouragé le sursaut
des Français. Sa voix, toujours chaleureuse, a joué un rôle essentiel
dans l'éveil de la Résistance et son influence n'a cessé de s'amplifier
jusqu'à la fin de la guerre. Maurice Schumann a été un commentateur
exceptionnel des événements et un soutien quotidiens pour les clandestins
" .
C'est en juin 1943 que débutèrent les combats entre maquisards et
forces de l'Axe dans les massifs de Haute Savoie. Dès le début de
la reconnaissance des maquis par Londres, la radio de Londres et Maurice
Schumann en particulier, leur vinrent en aide par des transmissions
de type radiophonique. C'est ainsi que le Porte-Parole du CFLN prit
clairement position pour les maquis, les faisant par là même découvrir
à l¹opinion publique : " Le maquis, c¹est un front français ; les
réfractaires, c'est une armée, une des armées qui font l'armée française
". Au fur et à mesure qu'un débarquement allié se précise, les appels
en provenance de Londres pour appeler les jeunes à rejoindre les maquis
échappant ainsi au service du travail obligatoire s'intensifient.
A l'inverse, la pression s'exerce également sur les miliciens chargés
de mettre fin aux maquis. A leur égard, Maurice Schumann aura ce mot
: " Miliciens, futurs fusillés ". Il en va de même concernant les
gardes mobiles français qui doivent participent aux côtés des Allemands
à l'assaut contre les Glières. Il leur lance cet avertissement le
2 février : " Chaque goutte de sang qui demain, peut-être par votre
faute, coulera dans les ravins et les gorges de notre Haute-Savoie,
retombera sur vos têtes ". Les Glières resteront parmi les moments
radiophoniques les plus émouvants de la guerre. Un véritable dialogue
va s'instaurer durant les trois mois que va durer la bataille. Les
combattants envoient régulièrement à Londres des télégrammes, dont
certains, sitôt décodés, sont portés à Maurice Schumann. Ce dernier
les évoquent à la radio afin que chaque Français sache ce qui se passe
dans ces massifs montagneux. Lorsqu'il s'adresse aux maquisards, il
emploie le style direct. Ainsi, le 2 février 1944, ayant appris que
les maquisards allaient être attaqués sous peu, il " sonne le tocsin
" en commençant par ses mots restés célèbres : " Alerte au maquis,
alerte à la Haute Savoie ! Allo, allo, maquis de Haute Savoie, S.O.S.,
S.O.S, L'Oberführer Joseph Darnand a décidé demain 3 février (je répète
: demain 3 février) une attaque massive contre les réfractaires et
les patriotes retranchés dans les montagnes de Haute Savoie ". Dans
son allocution du 7, il continue de guider les maquisards alors en
plein combat : " Allo, allo, maquis de la Haute Savoie, ! maquis de
Haute Savoie, écoutez bien, écoutez bien les consignes fraternelles
que nous vous adressons en plein accord avec les autorités alliées
". L¹aide apportée par Maurice Schumann aux maquis fut aussi l'occasion
de joutes oratoires par la radio avec Philippe Henriot, lui aussi
redoutable communicateur. Leurs échanges ne prirent fin qu'avec l'assassinat
de ce dernier par la Résistance. Le soulèvement des maquis marque
effectivement le début de la vaste offensive alliée qui doit avoir
pour but de libérer le sol national et de là toute l'Europe du joug
nazi. A ce propos, lors de leur première rencontre quatre ans plus
tôt, Schumann avait obtenu de de Gaulle l'engagement solennel qu'il
participerait bien à la reconquête du territoire national.
Le 30 mai 1944, le porte parole de la France Libre cesse, du moins
en direct, de parler à la radio. Le 6 juin, il embarque avec le IV
e commando britannique. Capitaine à la 2ème DB, il participera à la
libération de Paris puis à celle de Strasbourg d'où, le 4 décembre
1944, il prononce une allocution très émue. Pour la dernière fois,
il s¹exprime le 8 mai 1945. Il termine par un vibrant hommage aux
Français de la France Libre qui n¹ont, dit-il, jamais cessé de croire
en la France. Quelques semaines plus tard, le 14 juillet, il reçoit
des mains mêmes du général de Gaulle la Légion d¹honneur à titre militaire
et la Croix de la Libération.
CONCLUSION
Comme de nombreux résistants, Maurice Schumann s'engagera
en politique. Sollicité par Jean Catrice, dirigeant dans le Nord du
MRP pour prendre la tête du mouvement aux premières élections générales
à Lille, Maurice Schumann optera en effet pour le Nord. Preuve que
les Français le reconnaissent comme un grand résistant, et surtout
les électeurs de notre région, l'ancien porte parole de la France
Libre sera le meilleur élu de toute la France. Militant catholique,
résistant, gaulliste, Maurice Schumann a sans aucun doute joué un
rôle important dans le relèvement de la France. Certes, il n'a pas
été un combattant les armes à la main, mais par sa rhétorique, il
a su galvaniser par ses mots l'action des résistants sur le terrain,
y compris dans la zone rattachée. Espérons qu'un jour, à Bondues ou
ailleurs, on puisse de nouveau y entendre la voix inimitable de celui
qui, durant quatre années, rappela à la France occupée, et en particulier
aux habitants de la zone rattachée, que la France entendait effectivement
rester debout face à l'oppresseur nazi et retrouverait un jour son
indépendance nationale et son rang de grande puissance.
Thibault TELLIER Université Lille 3-Charles de Gaulle CRHENO
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